Critique de La Venise du Nord

"Venise, divise, vessie"...

Mais c'est quoi ce bouge ? Bruges ? J'en perds mon latin... Nous ne sommes pas en Italie ?

C'est un jeu signé Sébastien Dujardin, l'auteur qui a une maison d'édition. Oui : Pearl Games. Mais attention, le jeu est édité chez Asyncron... T'as pigé ? parce que, j'ai l'impression que tu pioches, là...

Et tu sais quoi, il s'agit de son premier jeu. Oui, mais sorti après son second.

A y perdre le nord, cette histoire...

Bon, le but ? Construire, produire, vendre. Faire un canal aussi. Plusieurs, même.

Et un canal, c'est quoi ? "En théorie de la communication, c'est la partie d'un système de communication qui assure la transmission de l'information entre une source et un destinataire".

C'est clair, non ?

Matériel

Vous avez beaucoup de boites de jeux à la maison ?

Oui ? Eh bien tentez d'en trouver une de même taille que celle-ci.

A première vue, c'est une boite au format carré conventionnel... et puis quand on la pose à côté de ses copines, elle est plus petite, ou plus grande, c'est selon. Comme si elle voulait déjà se faire remarquer, se démarquer.

Vous la rangerez donc où vous voulez, puisqu'elle ne sera pas faites pour se trouver à côté d'une hypothétique soeur. A la verticale, à l'horizontale : peu importe, vous n'aurez de toutes façons jamais l'obligation de vous tordre le coup pour lire le titre du jeu.

L'illustration de couverture est elle aussi engageante et vous tend la main, vous invitant à vous y balader.

Dessus, le nom de l'auteur bien mis en avant (il faudra retourner la boite pour connaitre le nom de l'illustratrice), ainsi que le prix ludique obtenu par le jeu avant même d'être édité. Pourquoi avoir tant attendu pour l'avoir entre nos mains, du coup ?

Après lecture de la liste complète du matériel et du petit pitch de mise en place de la thématique sur ce dos de boite, on n'a qu'une seule envie : soulever le couvercle. Et on n'est pas déçu : les tuiles sont de bonne qualité, les illustrations donnent envie (celles des cartes ont un style très "Libellud") et si la boite n'est pas pleine à craquer, le matériel proposé, très cosmopolite, donne envie d'en savoir plus et de se lancer dans l'aventure.

Au passage, on apprécie que le jeu soit proposé avec assez de sachets zip pour tout ranger, histoire de gagner du temps lors des prochaines mises en place, qui, déjà de base, ne sont pas bien longues...

Règles

Neuf tuiles hexagonales font office de plateau de jeu. On peut les placer comme on le souhaite et donner à la ville, qu'elles symboliseront, la forme de son choix. La règle du jeu apporte quelques conseils pour débuter avec une mise en place initiale entrainant des parties qui se trouveront être moins complexes à maitriser.

Chaque joueur démarre la partie avec cinq dés. A son tour, on lance deux de ses dés.

On doit ensuite attribuer une fonction différente à chacun des 2 dés : un dé pour déplacer son pion bourgeois et un dé pour activer la tuile sur laquelle le bourgeois termine son déplacement.

Dans la Venise du Nord, il y a trois matières premières, qui produisent à leur tour des ressources : L'or produit des bijoux, la laine produit des vêtements tandis que le lin produit de la dentelle.

Les tuiles confèrent différents pouvoirs aux bourgeois qui s'y trouvent, c'est à dire à vous, lors de votre tour, mais aussi aux joueurs se trouvant sur la tuile que vous activez. Elles permettent par exemple de récupérer des matières premières ou encore des cartes permettant de transformer nos ressources : on en pioche autant que la valeur du dé mais on n'en conserve qu'une. Une fois les cartes qui permettent de transformer vos matières premières récupérées, il nous faut encore récupérer les matières premières nécessaires à leur construction pour qu'elles puissent enfin stocker de nouvelles matières premières, qu'elles transformeront une fois chaque case de stockage remplie par la bonne matière.

La tuile "Marché" permet de revendre les ressources. Le cours du marché fluctuera durant la partie et il faudra essayer d'optimiser ses ventes. On peut également vendre dans les ports, mais les places y sont limitées et on ne peut vendre dans un port une ressource déjà vendue. Les ressources sont vendues au prix du dé d'activation.

De plus, le jeu propose un système de majorité bien retors : lorsque vous activez une tuile, vous pouvez y laisser votre dé si aucun dé n'y est encore ou si votre dé a une valeur supérieure ou égale à celle du dé actuellement en place, qui est alors rendu à son propriétaire.

Si à un moment, en début de tour, un joueur n'a pas deux dés devant lui pour les lancer, il en récupère depuis la tuile de son choix.

Mais à quoi servent ces dés posés sur les tuiles ?

En fait, si à la fin de votre tour votre pion bourgeois se trouve sur une tuile que vous contrôlez (ayant un de vos dés placé dessus) et que vous contrôlez une tuile adjacente, vous pouvez placer un de vos cinq ponts entre ces deux villes en payant en ressource la différence de valeur entre les deux dés et reprendre un de vos deux dés présents dans ces villes.

S'il s'y se trouve un pont adverse, vous pouvez le remplacer par l'un des vôtres, mais vous devrez payer davantage : la somme de vos deux dés !

Oui d'accord, mais à quoi servent les ponts ?

Quand vous passez d'une tuile à une autre en passant par un de vos ponts, vous pouvez choisir de ne pas compter ce déplacement (et comme vous devez vous déplacer du nombre exact, sans passer deux fois par une même tuile, cela vous donne plus de souplesse dans vos déplacements). De plus, en fin de partie, vous gagnez des points en fonction de votre plus grande chaine de ponts en mettant au carré le nombre de ponts connectés (si vous avez les cinq ponts connectés, vous remportez 25pts, et probablement la partie... !). Les cartes Maitre d'œuvre remportées durant la partie fonctionnent de la même façon avec ce même maximum de points, et, bien entendu, les ventes de ressources vous auront données elles aussi des points de victoire.

A la fin de la partie (quand un joueur a posé tous ses ponts, ou quand la pioche de cartes "commandes" est épuisée, ou encore une fois toutes les ventes du marché terminées -cas le plus probable-), le joueur ayant le plus de points remporte la partie.

Le jeu n'est pas trop compliqué tout en parvenant à proposer aux joueurs de nombreux choix lors de leurs tours ainsi que sur le plus long terme. La règle est bien expliquée, avec des exemples.

Peut être un peu trop condensée, mais on s'y retrouve rapidement. Et puis, le jeu est prenant, et ses mécanismes rapidement assimilés.

Durée de vie

Nous avons ici un jeu à mi-chemin entre le jeu familial et le jeu pour joueurs confirmés.

En effet, malgré des règles faciles à assimiler et une durée de partie pas très longue, il y a plusieurs façons bien différentes pour marquer des points et le jeu pousse à l'interaction : vous ne jouerez pas dans votre coin, toujours de la même façon.

Oh que non, car on essaie de ne pas trop activer les tuiles où se trouvent les autres, tout en essayant de se placer justement là où on pense que les adversaires souhaitaient aller, histoire d'avoir une petite action en bonus. De même, on ne laisse généralement pas un joueur tranquille quand il commence à créer une chaine de ponts permettant un gain de points solide en fin de partie.

De même, on suit le cours du marché et ce que chacun possède pour essayer de deviner les intentions adverses et parfois même pour leur couper l'herbe sous le pied...

Et ce n'est pas tout !

Car il existe un nombre considérable de mises en place du plateau de jeu, si on peut l'appeler comme ça, et si dans certains jeux de tels changements restent anecdotiques, ce n'est pas tant le cas ici et les parties diffèreront vraiment l'une sur l'autre : un véritable bon point.

Il est donc difficile de faire la fine bouche : la durée de vie du jeu est plus que réussie, et si vous craquez lors de votre première partie, il vous en faudra bien davantage pour en faire le tour, chose remarquable pour un jeu d'une telle accessibilité et d'un plaisir ludique assuré.

Le conseil de Jedisjeux

Ne laissez pas un joueur aligner ses cinq ponts !

Casser celui du centre lui fera perdre 21pts, passant d'un bonus de 25 à 4 points de victoire...

Avis de la rédaction

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Des dés, des tuiles hexagonales, des ressources à obtenir : non, ce jeu n'a pourtant pas grand chose à voir avec Catane (qui est à mes yeux un excellent jeu, soit dit au passage). Lancer deux dés et les assigner à des effets, ça ferait penser à Les châteaux de Bourgogne, ou encore à Burdigala, autres très bons jeux de société. Et si je me contente dans cet avis de citer d'autres jeux, c'est bizarrement parce que La Venise du nord parvient à ne ressembler à aucun autre, à avoir sa propre identité. Il figure en ce qui me concerne dans le panthéon des jeux "passerelle" permettant de passer en douceur des jeux dits "familiaux" à ceux dits "pour joueurs confirmés". A ne pas rater.
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N'essayez pas de trouver un nouveau Troyes dans ce jeu. Même si celui-ci est rempli de possibilités et de stratégies, il est bien plus simple à aborder. Mais, la simplicité des règles n'en donne pas moins un excellent jeu, que vous pourrez jouer entre geeks du jeu ou avec des gens qui jouent plus rarement. L'interactivité est très présente, les stratégies sont nombreuses, la rejouabilité est très grande et le tout pour des parties courtes. Un excellent apéritif ou dessert pour une soirée jeux :)
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