La tactique dans Sankt Petersburg

Pour fêter les 10 ans de ce superbe jeu, Hans im gluck nous propose une remasterisation de ce dernier qui est arrivée fin octobre. L’éditeur change surtout le look du jeu, sans rien ajouter à ce qui existe déjà.

Mais moi, ce qui m’intéresse, c’est le jeu en lui-même, même si j’hésite fortement à acheter la nouvelle version tant ma boite est usée à force d’y avoir joué (et pas parce que le matériel est de mauvaise facture, bien au contraire:)).

Je vais donc explorer le jeu par ses différents éléments.

Les trous et la gestion de la main

La clé de la victoire dans ce jeu réside dans le timing. Il est très important de gérer sa main pour s'adapter au timing.

Le timing, ça se gère par l'observation de qui sera premier joueur à la première phase. De là, on essaye de se réserver une carte lors d'une phase importante. Si on est 4ieme et qu'il y a 3 artisans qui arrivent, ça signifie souvent un tour perdu. Si on est premier joueur, plus y'a de nouvelles cartes qui arrivent, plus on a de choix intéressants. Il est important de prendre des cartes en main pour la phase suivante ou d'attendre que les autres se fassent leur place pour agrandir la nôtre. A propos de ce fameux trou, il arrive fréquemment qu'on laisse un joueur faire ses actions en attendant le moment propice pour faire “son trou”.

En ça, la gestion de la main est très importante, car elle permet de reporter une dépense à plus tard.

Il y a quelques règles à respecter à ce jeu concernant la main :

- Ne jamais prendre une carte qu'on n'est pas sûr de poser.

Rien de plus catastrophique que de prendre une amélioration d'artisan qu'on ne pose pas.

Si je vois quelqu'un faire ça, je suis prêt à payer plus cher mes artisans pour que celui qui a fait l'erreur la garde en main.

De même, prendre l'académie en main en début de partie est une grossière erreur.

En effet, si on veut de la souplesse, il faut de la place en main, et occuper cette place par une carte pendant 4 ou 5 tours, c'est perdre de cette souplesse qui est vitale.

Sauf à quelques exceptions près, la main doit tourner. Ce n'est pas une archive.

- Eviter de prendre des artisans de base en main.

Les artisans de bases ont une dynamique un peu particulière. Comme les 2 autres types de carte, on ne la résout qu'une fois par tour.

Ceci dit, ils ont trois particularités : ils ne sont pas chers et rapportent pas mal d'argent (du moins en début de partie). La phase qui le précède est celle des améliorations, à savoir qu'il n'y a pas de revenus. Les artisans sont nombreux (6 de chaque).

En gros, si on prend un artisan en main, il ne servira qu'au prochain tour. Il faut aussi penser que si l'artisan reste sur la table, c'est qu'il est trop cher. Je n'ai jamais vu un mineur ou un bûcheron rester sur le plateau en fin de phase verte. Lors de la phase d'artisan, on est rarement très riche. Hormis au premier tour, on a rarement l'occasion de poser plus d'un artisan.

Pour être honnête, le seul cas où je prends un artisan en main, c'est quand quelqu'un a fait le boulet et a pris son amélioration en main sans avoir l'artisan qui l'accompagne. C'est plus de l'agression pour faire couiner qu'autre chose !:)

Les différentes phases : Les artisans

Pendant une phase d'artisan, les joueurs ont tendance à se jeter sur l'artisan le moins cher disponible. Un rouble, c'est un rouble, et comme tous les artisans ont le même effet, il est naturel de faire des économies.

Ceci dit, il faut aussi connaitre les extensions d'artisans, certaines sont plus efficaces que d'autres, ou s'adapteront mieux à une stratégie.

Un artisan spécial et unique (donc pas de réduction dessus), Czar & Carpenter, a tendance à coûter un bras, mais a la possibilité de s'améliorer en n'importe quel autre artisan. Dans l'extension, l'auteur propose de le remplacer par une carte qui coûte 5 roubles de moins, mais qui n'en rapporte que 2 par tour tout en gardant sa possibilité d'amélioration. Autant dire qu'on n'hésite plus avec celui-ci, surtout s'il arrive le tour où on est premier joueur aux améliorations (toujours le timing).

La phase des artisans est vitale lors des deux trois premiers tour. Il ne faut surtout pas la rater.

Au premier tour, on est riche, pas de problème, tout le monde en achète deux.

Au deuxième, c'est une autre paire de manche. Il faut, lors des phases de noble et d'extension, penser à garder suffisamment de roubles pour la prochaine phase d'artisan. Il n'y en aura probablement qu'un. Il faut donc bien faire attention à sa place pour savoir si on aura assez de 5 ou s'il vaut mieux réserver 7 roubles.

Il faut savoir qu'il y a entre 4 et 7 tours de jeu, au-delà du 3ieme tour, les artisans deviennent beaucoup moins rentables. D'autant que si un joueur se gave à ses tours là, il accélère d'autant la fin de partie. C'est contre-productif en général car les artisans ont besoin de temps pour être rentables.

Les différentes phases : Les bâtiments.

Ah, nous entamons les phases variées du jeu.

La phase des bâtiments est celle qui est la plus variée de toutes d'ailleurs du fait du nombre de bâtiments, et de la présence de quelques bâtiments spéciaux.

Pour les bâtiments normaux, plus ils sont chers, moins il y en a, mais plus le rapport coût/point de victoire est important.

Mais plus il y a de bâtiments, plus il y a de réductions possibles. Et là, on comprend vite qu'il ne faut pas laisser quelqu'un se gaver de tous les petits bâtiments d'un même type.

Il est possible de faire des stratégies essentiellement basées sur les bâtiments, mais il faut savoir que les revenus en roubles sont rares. Il faudra se baser sur les améliorations et les artisans. Cette stratégie fonctionne très bien, mais je la déconseillerai fortement aux joueurs débutants, car il faut vraiment maîtriser le tempo du jeu pour gagner.

J'en ai parlé il y a trente secondes des bâtiments spéciaux. Ils sont au nombre de 4, certains en deux exemplaires.

L'observatoire: Le bâtiment qui a fait couler le plus de pixels sur ce jeu. Il coûte 6 roubles (8 après correction), et apporte un point de victoire par tour. On peut renoncer à ce point de victoire pour aller chercher une carte dans un des 4 tas disponibles (ce qui remplace l'action et uniquement en phase bleue). La carte, on en fait ce qu'on veut : dans la main s'il y a de la place, on la pose en payant ou on la benne. C'est d'ailleurs le seul moyen de se débarrasser d'une carte.

Cet observatoire permet de faire plein de choses en fait. Il va renforcer votre stratégie en vous laissant le choix d'une carte en plus, quitte à la jeter. Il vous permettra de ce fait d'améliorer votre collection de nobles, et il permet de réduire la taille d'un paquet, et par la même raccourcir le temps de jeu. C'est le truc idéal pour contrer le p'tit malin qui s'est gavé d'artisans au tour 4, ça lui apprendra !

Le village : Le village est un de mes bâtiments préférés. Il coûte 2 roubles, mais une fois posé, c'est comme si on l'avait payé 6. Ce qui fait une économie non négligeable lors d'une évolution.

Il ne sert qu'à ça. On pourrait penser que le poser tout de suite est bien étant donné son faible coût, j'ai envie de dire… non ! Posé ou en main, c'est pareil. Il ne coûte que 2 roubles, donc on pourra toujours le poser si on a besoin de place en main. 2 roubles, c'est énorme quand on sait qu'il en manque toujours 1 pour faire un truc. Autant retarder le plus possible cette dépense.

La taverne: Un autre bâtiment qu'on ne pose que très tard, et qui ne coûte pas cher, c'est la taverne. Elle permet de dépenser jusqu'à 10 roubles en fin de phase bleue pour les transformer en points de victoire (au taux de 2 roubles par point). En fin de partie, c'est le meilleurs rendement rouble/point de victoire, mais en début de partie, c'est nul. Il n'est jamais méchant de le prendre en main, et de le poser plus tard pour se faire de la place en main. Toujours la même optique qu'un rouble dépenser plus tard a moins d'impact que trop tôt.

La bibliothèque : Le bâtiment dont on apprend à se passer à force de jouer. La bibliothèque pour 2 roubles ajoute une place dans votre main. Il ne faut pas hésiter à s'en servir quand on l'a, sinon, c'est gâché. C'est un bâtiment de début de partie, car il ne faut pas oublier qu'à la fin du jeu, chaque carte en main vous coûtera 5 points de victoire. Elle se retrouve systématiquement améliorée à partir de la moitié de partie. Si ce n'est pas le cas, dépêchez-vous de le faire !:)

Les différentes phases : Les nobles

Les nobles sont la deuxième source de roubles du jeu. En fait, ce sont des cartes mixtes qui rapportent un peu de points de victoire, et un peu de roubles. Ils ont aussi la particularité d'apporter beaucoup de points de victoire en fin de partie avec la collection.

De même que pour les bâtiments, plus ils sont chers, moins il y en a dans le paquet. Les plus chers rapportant des points de victoire.

Même lorsqu'on fait une stratégie bâtiment, il ne faut pas négliger d'acheter quelques nobles, d'une part pour les points de victoire qu'ils apportent en fin de partie, d'autre part pour éviter que les autres joueurs ne fassent leur collection trop facilement.

Les améliorations de noble sont, quant à elles, très importantes en point de victoire. Elles ont le mérite d'être uniques, donc de faciliter les collections, et d'avoir des rendements conséquents.

Je n'hésite pas à prendre des améliorations de noble en main quand j'en ai l'occasion, même si je fais une strat basée sur les bâtiments. Ne serait-ce que pour le piquer sous le nez du voisin (toujours le plaisir de l'entendre couiner).

Déséquilibre

On entend souvent parler des déséquilibres de la cantatrice (plus communément appelée la grosse vache) et de l'observatoire.

C'est vrai pour la grosse vache si elle est jouée au premier tour. Sans l'extension, il suffit de lui interdire de venir au premier tour et c'est réglé. Si on a la chance d'avoir l'extension qui modifie son revenu, elle reste intéressante mais n'offre pas la partie aussi facilement (pour battre une cantatrice au premier tour, faut s'y mettre à deux).

Pour l'observatoire, la modification n'apporte rien à mon sens. La rendre plus chère ne modifie pas sa façon de jouer. Elle reste une carte intéressante et les débutants penseront toujours qu'elle est fumée, car elle demandera un peu d'expérience pour être contrée.

Conclusion

Même si j'utilise de grands mots, comme "stratégie", Sankt Petersburg est un jeu essentiellement tactique, voire opportuniste. Il faudra sans cesse regarder ce que font les autres pour espérer leur piquer la carte qu'ils attendent sous leur nez, en faisant bien gaffe de pouvoir la poser. Ce n'est pas gênant car il n'y a pas de combinaison de cartes, toutes sont génératrices de points de victoire.

La seule ressource du jeu est le rouble qu'il faudra rentabiliser pour le mieux, et le mieux est l'ennemi du bien, surtout pour les autres joueurs !

Avis de la rédaction

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Comment noter un jeu dont on a dépassé la centaine de partie ? Difficile de ne pas lui mettre la meilleurs note. D'autant que j'ai toujours plaisir à le sortir et à le faire découvrir. Aujourd'hui, Sankt Petersburg est difficilement trouvable, mais il est un tel carton que je ne me fait pas de soucis quant à sa réédition future, un genre d'édition décennale. Bon, pour le jeu, je l'ai déjà dit dans la critique, je l'adore. Sankt Petersburg se joue en 20 à 40 minutes, ne demande pas trop de réflexion sans en être totalement dénué. Un truc que j'adore, c'est qu'on peut passer en restant dans le jeu, ce qui donne des situations assez cocasses où un seul des joueurs joue, les autres attendant qu'il fasse une action bien précise. S'il la fait, ceci peut déclencher plusieurs tours de table. Si elle n'arrive pas, on voit des joueurs faire la tête car ils n'avaient pas prévu de ne rien faire. Un jeu où il est urgent d'attendre, mais pas trop !:)
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Super jeu de cartes aux dessins bizarres (je sais pas si j'aime ou si je les trouve laids), simple et tactique. Il y a plus d'interactions que ne laissent le croire les premières parties même si c'est pas le trait majeur du jeu. Le jeu reste tout de même assez froid et win to win. Excellent durant des années, le jeu a pris un coup de vieux selon moi depuis deux trois ans (années 2010...)
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Un excellent jeu de cartes aux graphismes anciens mais sympathiques tout de même. Bigrement stratégique, et subtile, il ne se laisse pas dompter en une partie. effectivement difficile a trouver aujourd'hui.
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Il y a 2 commentaires

jedisjeux
By kub2boa | 18 nov. 2014 à 09:16

Merci pour ce guide tactique. Je vais pouvoir partir avec un brin d'avance sur mes adversaire (a moins qu'ils ne lisent ce post) pour essayer ce jeu que je ne connais pas encore :P . Simplement kickstarté car tellement d'eloge sur lui.

Cordialement.

jedisjeux
By Blue | 18 nov. 2014 à 09:23

Merci pour ce guide tactique. Je vais pouvoir partir avec un brin d'avance sur mes adversaire (a moins qu'ils ne lisent ce post) pour essayer ce jeu que je ne connais pas encore :P . Simplement kickstarté car tellement d'eloge sur lui.

Cordialement.

- kub2boa

Il est bon de connaitre un peu le jeu quand même avant d'appliquer ces petits trucs :)

Tu ne regreteras pas ton achat, j'hesite à acheter la nouvelle version car ma vieille version s'use et ce serait dommage de dégrader un objet aussi magnifique encore plus :)