a distant plain

21 déc. 2014 | par polybe

Spécifications de la partie


Nombre de joueurs
4
Date
21 déc. 2014

Spécifications du jeu


Nombre de joueurs
1 à 4 joueurs
Âge
à partir de 12 ans
Durée
180 minutes
Date de sortie
1 janv. 2013
Illustrateur(s)
Volko Ruhnke, Brian Train
Editeur(s)
GMT Games

Scores

# Nom Score
1 Cpte Miller (Coalition int) 0
2 Polybe (Gvt Karzaï) 0
3 Deadplayer (Talibans) 0
4 Gd Strat (Warlords) 0

Photos

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polybe
By polybe | 21 déc. 2014 à 18:45

Au programme, « A distant plain », la simulation de la guerre civile afghane proposée par GMT dans sa série COIN. Pour Deadplayer, Cpt Miller et moi-même, ce jeu complexe est une totale nouveauté. Une bonne moitié de la première séance est donc consacrée à l'explication de règles par le Grand Strat.

Heureusement que le jeu est prévu pour quatre joueurs seulement car dans notre club tourangeau de Ludo Ergo Sum, il n'y a pas une foule d'amateurs pour ce type de jeu : Il faut dire qu'à ce jour, deux soirées ludiques, entre le wargame et le jeu de plateau, ne nous ont permis de couvrir qu'un tiers du scénario intermédiaire (la période 2005 à 2012). Et puis on peut comprendre que certains répugnent à s'amuser sur un thème aussi terrible que la tragédie afghane. (notre seconde séance s'est déroulée le jour même du massacre des écoliers à Peshawar par les Talibans pakistanais).

Pour ceux qui parviennent à faire la part des choses entre une actualité horrible et un divertissement cérébral et inoffensif, le matériel aide à se mettre rapidement dans le contexte géopolitique.

Le plateau est centré sur une carte sobre mais élégante des provinces, villes et routes afghanes – le nom des provinces pachtounes est écrit en lettres latines avec le mot Pashtounes en lettres arabes – et des alentours dont les provinces tribales pakistanaises où les Talibans ont leurs bases arrières. Justement, en périphérie du plateau, outre les différents indicateurs des quatre factions, on peut suivre le positionnement du Pakistan vis à vis des Talibans sur une graduation entre « sponsorship » et « Hostility ».

Chaque faction a son lot de pions avec, pour les seigneurs de la guerre et les Talibans, des petits cylindres double face selon que leurs séides ont été détectés ou non par le gouvernement et par la coalition internationale.

Enfin, sur chacune des cartes d’événements, les auteurs ont pris soin de placer une photographie de presse et souvent un petit texte en anglais pour illustrer le fait en question, et pas seulement décrire l'effet de la carte dans le jeu.

L'ensemble du matériel a de l'allure.

Avant même d'écouter les règles, nous choisissons notre faction et prenons note de nos objectifs respectifs.

Cpt Miller se place d'emblée à la tête des forces de la Coalition internationale. Pour gagner la partie, il devra convaincre la population afghane de soutenir le gouvernement en place mais aussi se carapater rapidement de ce bourbier afghan en évitant de ramener ses soldats dans des sacs. Pour cela, il lui faudra d'abord chasser la guérilla talibane ou les narco-trafiquants en mobilisant d'une part les troupes gouvernementales – sans que le gouvernement ne puisse s'y opposer – et en activant d'autre part la puissance militaire de la coalition, en particulier ses frappes aériennes. Les actions civiques en faveur des populations dans les territoires pacifiés pourront ensuite gagner le cœur des Afghans.

Pour ma part, je me coiffe de la toque d'Astrakhan de Karzai et dirige le gouvernement afghan. Cyniquement, le jeu ne m'impose pas du tout d'obtenir l'adhésion de la population à mon action gouvernementale, d'ailleurs il peut m'arriver de traîner les pieds quand il s'agit de dérouler les programmes d'actions civiques des Occidentaux. Il me suffit que les provinces soient pacifiées militairement par la coalition et par ma police/mon armée et que les chefs de tribu et autres notables dans les provinces me soient redevables grâce à de petites attentions financières... Pour obtenir les fonds à distribuer, je compte en partie sur l'aide internationale et je dois donc faire plaisir aux bailleurs de fonds en éradiquant les champs de pavot, réinstallant des réfugiés ou en détruisant les camps de terroristes. J'utilise pour ce faire mes troupes et ma police, pléthoriques mais médiocrement efficaces au combat et qui ont une tendance fâcheuse à la désertion ou à être infiltrées par les terroristes.

Deadplayer, le seul barbu de notre groupe, va fort logiquement devenir le mollah en chef des Talibans. Son but sacré est de multiplier les bases militaires des Talibans et d'obtenir le soutien des populations à son mouvement et à la charia. Les zones pashtounes lui sont plus facilement acquises que celles des autres ethnies. Les vocations talibanes naissent encore plus facilement quand l'action gouvernementale exaspère la population (destruction des récoltes de pavots, corruption à haute dose) et que le Pakistan ferme les yeux au Waziristan voire que l'ISI aide l'installation des camps. Les Talibans ne sont repérés et vulnérables qu'après être passés ouvertement à l'action (embuscade, attaques terroristes). Ils passent donc leur temps à apparaître, à disparaître, à aller ailleurs.

Enfin le Grand Strat incarne la nébuleuse des Seigneurs de la guerre et autres trafiquants de drogue. Son activité économique prospérant bien mieux dans le chaos, il doit faire en sorte que les provinces ne soient ni sous le contrôle des Talibans ni sous celui du gouvernement. Pour cela, ses combattants doivent peser mais sans viser le contrôle total. Son second objectif est un gros niveau de revenu. Pour cela, il doit développer une agriculture d'un genre très spécial mais aussi négocier ses services variés (protection, logistiques) aux uns et aux autres. Tout cela est bien plus facile dans les zones non pashtounes (Ouzbeques, Tadjiks, Hazaras...).

Comme on pouvait facilement l'imaginer, ce n'est pas un jeu collaboratif, ni même un jeu d'alliance : chacun gagne seul et les alliances sont limitées et provisoires.

« A distant plain » n'est pas non plus un card driven dans la mesure où les joueurs ne disposent pas d'une main de cartes à utilisation variée. Toutefois, chaque tour commence par le tirage d'une carte événement. (En fait, deux cartes puisqu'on connaît à chaque instant la carte en cours et la carte suivante.)

Chaque carte événement donne deux informations :

tout d'abord, un ordre du tour entre factions. Par exemple, Coalition, Talibans, Gouvernement, Seigneurs de la Guerre.

Ensuite, un événement spécifique y est développé, avec en général deux effets possibles et divergents. L'effet décrit est souvent ponctuel mais parfois il s'agit un atout permanent.

L'ordre du tour indiqué sur la carte ne concerne que les factions éligibles de ce tour, c'est-à-dire en général celles qui n'auront pas joué lors du tour précédent, volontairement ou non.

Imaginons dans notre exemple que la coalition soit inéligible mais que les trois soient éligibles. En suivant l'ordre du tour, on va donc demander au joueur Talibans, première faction éligible, ce qu'il compte faire parmi quatre options :

1. Il choisit de faire une action principale illimitée assortie d'une action spéciale. Ce faisant, il donne au joueur suivant la possibilité de prendre l’événement ou de faire une action principale restreinte à une région.

2. Il choisit de déclencher l’événement mais il donne alors au joueur suivant la possibilité d'une action principale illimitée et d'une action spéciale.

3. Il choisit de déclencher une action principale illimitée mais sans action spéciale. Il restreint alors le choix du joueur suivant qui ne peut faire qu'une action principale limitée seulement (pas l’événement).

4. Il choisit de passer. Il grappille ainsi quelques ressources mais surtout il reste éligible pour la carte suivante, ce qui n'est pas le cas avec les autres options (sauf événements particuliers). L'inconvénient est qu'il donne ainsi au suivant la palette complète des quatre options.

On voit ici que c'est le premier joueur qui détermine la palette d'option offerte au joueur éligible suivant dans l'ordre du tour. Au moins, ce dernier pourra faire quelque chose. C'est toujours mieux que le sort réservé à la ou les factions éligibles restants qui ne peuvent espérer agir que si un des premiers passent.

Ce système est très malin car il faut avoir l'oeil partout. Ainsi, si l’événement suivant est alléchant et accessible, peut être faut-il mieux passer même si cela veut dire donner de bonnes options à ses adversaires dès ce tour. D'un autre côté, avoir la possibilité d'une action principale illimitée et une action spéciale est souvent le meilleur moyen de faire progresser significativement sa cause et tant pis si l’événement est laissé à l'opposition. Parfois une action limitée, aussi décevante soit-elle serait utile en se coordonnant avec l'allié du moment qui est en tête de liste sur la carte suivante.

Je ne vais pas détailler les différentes actions principales ou spéciales possibles. Chaque faction à les siennes, quatre principales, trois spéciales. Là aussi, on a envie de tout faire et les choix sont difficiles.

De temps à autre, la carte Evènement tirée est en fait une carte « propagande ». Chaque carte « propagande » est l'occasion de phases complémentaires variées comme l'encaissement des revenus, la possibilité de lancer des actions civiques supplémentaires pour le gouvernement/la coalition, de faire du sabotage pour les rebelles ou de faire glisser le positionnement du Pakistan. La phase « propagande » est aussi le moment où un joueur peut revendiquer la victoire s'il a atteint ses objectifs. Dans tous les cas, l'apparition de la dernière carte propagande de la pile de cartes sonne la fin de partie.

Comme je le disais au début de ce compte-rendu, notre partie est suspendue pour cause de fêtes de fin d'année, ceci au bout de deux soirées et deux phases Propagandes.

A vrai dire, la première phase Propagande est intervenue très vite. Ni moi ni Cpt Miller n'avions pu faire grand chose mais au moins mes revenus (impôts sur le trafic routier et surtout aide internationale) n'avaient pas été entamés par l'opposition et la collecte a permis de remplir les coffres gouvernementaux. J'ai commencé par jouer main dans la main avec la coalition au point même d'accepter un peu d'actions civiques dans des zones où je n'étais pas obligé de le faire. En échange, Cpt Miller a accepté de déployer davantage de troupes internationales dans le pays. Les premiers à en pâtir ont été les Chefs de guerres du Nord mais pour quelques bases détruites à Kunduz, d'autres se constituaient ailleurs. Surtout pendant ce temps là, en raison de l'attentisme bienveillant du Pakistan envers les Talibans, ces derniers s'implantaient partout dans les zones pachtounes.

Il m'a donc bien fallu changer de cible pour la seconde soirée de jeu tout en vérifiant que la coalition ne passait pas trop de temps à donner des cours de démocratie à la population.

L'expérience aidant, le jeu de chaque faction s'est d'ailleurs affiné. Comprenant la délicate mécanique de mouvement de troupes, d'identification des ennemis puis d'éradication, la coalition et le gouvernement ont pu nettoyer quelques zones de ses Talibans. J'ai pu investir dans un événement utile, l’entraînement pour repérer les voitures piégées, pendant que la coalition mettait en place ses drones predator, un autre événement. Dans le même temps, les Talibans apprenaient à disparaître et à resurgir ailleurs. Discrètement, les Warlords sabotaient les efforts des uns et des autres pour asseoir un contrôle militaire durable et commençaient à monnayer le passage des convois sur les routes.

Bref, chacun gagne en expérience pour une partie qui sera encore longue et haletante.