Critique de Egizia

Il y a de ces jeux qui parfois ne parviennent pas à se faire connaître alors que les rares initiés qui y ont gouté s'accordent à dire qu'ils ont tout d'un grand.

Egizia semble faire partie de ceux-là, étant paru au salon d'Essen 2009, parmi une avalanche de nouveautés. Les avis furent généralement bons, mais ils ne vinrent jamais en masse.

Et puis Iello décida de nous proposer le jeu en langue française, histoire de voir s'il percerait mieux ainsi en francophonie.

Du coup, cette fois-ci, Egizia n'y coupera pas, et nous allons voir si les bonnes opinions qu'on peut lire ça et là sur le net sont méritées ou si elles sont plus généreuses qu'elles ne devraient du fait justement que le jeu ne soit pas sur le devant de la scène...

Matériel

Egizia se présente sous la forme d'une boîte au format traditionnel, identique à celui d'autres jeux reprenant la même thématique Egyptienne, tel Amun Re, par exemple.

Sans faire chargée, son illustration de couverture, des plus réussies, parvient à mettre en avant tous les protagonistes qui vont vous faire vivre une belle histoire, le long du Nil.

Les habituelles informations soulignant la durée des parties, le nombre de joueurs pouvant pratiquer le jeu en même temps et à partir de quel age, se retrouvent en différents endroits de la boîte : vous ne pourrez pas les manquer.

Le quatrième de couverture (oui, utilisons cette expression, puisque nous avons parler d'histoire à conter), lui aussi aéré, n'oublie rien de l'essentiel : un petit speech pour la mise en bouche, le matériel du jeu présenté à l'écrit mais aussi en photo, le plateau de jeu mis en évidence.

Le tout bénéficie d'une prédominance de couleur dorée, bien vue et bien dosée, rappelant à chacun le désert Egyptien.

Bien, ne reste plus qu'à soulever le couvercle : on ne devrait pas nous accuser de profanation...

Et si vous regardez bien, vous devriez alors trouver une photo de l'illustrateur et une autre des auteurs : une mise en avant rare mais appréciable.

On laisse de côté le livret de règles pour le moment, ainsi que le plateau de jeu (après l'avoir déplié -en 4- pour profiter de son design très réussi).

Les quatre plateaux individuels, tous identiques, sont de la même épaisseur que ce dernier. C'est à noter tant on nous propose parfois du papier glacé pour ce qui est des "plateaux de jeu secondaires".

Pions et marqueurs sont eux aussi très réussis et en bon nombre.

Pour les ranger, des pochettes zip sont mises à dispositions et l'intérieur de la boîte de jeu, en carton épais, propose pour sa part des compartiments séparés, qui, si on se réfère aux dessins qui l'ornent, serviront chacun à ranger une catégorie de matériel. C'est beau, pratique, et bien pensé.

Ne reste plus qu'à parler des cartes, elles aussi de bonne qualité (mais pas toilées), qui ne devraient pas subir les âfres de l'age vu leur utilisation et qui expliquent le véritable intérêt de cette édition française tardive, puisqu'elles comportent un peu de texte.

Un sans faute, donc, qui donne envie d'embarquer...

Règles

Les jeux de pose d'ouvriers commencent à être bien représentés. Mais Egizia se démarque de ses petits copains par cette idée simple et thématique de poser les bateaux le long du Nil.

En effet, vous ne pouvez que descendre le fleuve.

Ainsi, vous ne pouvez jamais revenir sur les cases dépassées, mais si vous voulez prendre les meilleures cartes ou être certains d'avoir de la place là où vous souhaitez aller, mieux vaut ne pas trainer et partir devant les autres joueurs... oui, mais sans trop leur laisser d'emplacements si facilement remportés à l'arrière.

Tout le sel du jeu est là... et en bien d'autres endroits.

Car pour marquer des points, il vous faut construire sur différents monuments, tels le Sphinx, l'obélisque ou la pyramide, chacun ayant des capacités spéciales. Mais pour construire, il vous faut des équipes de construction fortes, et donc aller sur les cases qui les consolident... oui, mais, plus vos équipes sont efficaces et plus il vous faut les nourrir : il va donc vous falloir de la nourriture.

Tout le long du Nil, à chaque tour, apparaissent des cartes vous octroyant un peu de tout cela et bien plus encore (pas mal de capacités spéciales bien intéressantes), mais comme les champs que vous aurez acquis demandent plus au moins d'eau, il faudra faire attention à l'irrigation : deux cases permettent de faire fluctuer celle-ci et de rendre inactifs certains champs, entrainant parfois une famine bien douloureuse.

L'interaction est donc bien présente, et ce d'autant plus que les places dans les monuments sont restreintes. Le Sphinx vous fera piocher des cartes "objectifs secrets", pouvant rapporter des pts de victoire non négligeables en fin de partie, l'obélisque devient de plus en plus dur à bâtir (il vous faut de plus en plus de main d'œuvre et de pierres à la fois) mais permet, tout comme les tombes, donnant pour leur part des PV de façon exponentielle, de vous améliorer en pierre ou en blé. La pyramide offre quant à elle des points additionnels selon un système de majorité. Seul le temple ne propose pas de pouvoir en plus, mais peut-être y construirez-vous afin de bien répondre à vos fameuses cartes objectifs...

C'est qu'avec tout ça, je ne vous ai même pas parlé du livret de règles en lui-même.

Eh bien ma foi, il est très bien réalisé, reprenant la typologie de la version allemande et en corrigeant les coquilles. Toutes les cartes du jeu y sont expliquées en annexes. Seul une règle de jeu récapitulative ne figure pas, en colonne dans chaque page, en feuille volante ou en carte pour les joueurs.

Mais le jeu se maitrise très vite, il faut avouer.

Il est de plus très plaisant à jouer, et s'il demande un peu de concentration, il saura satisfaire autant les gros joueurs que ceux plus occasionnels.

Durée de vie

Egizia saura faire varier les parties et ce pour diverses raisons.

Déjà, l'ordre d'arrivée des cartes, si elles sont en partie triées, permet une diversité assurée.

Les cartes à objectifs secrets vous feront jouer également différemment d'une partie à l'autre.

Selon le nombre de joueurs, le ressenti n'est pas le même. Même dans une configuration identique, vous pourrez assister à des manches où tous les joueurs vont poser leurs bateaux et d'autres ou tous vont se précipiter sur le Nil et n'en poser qu'une partie.

Au fil des parties, comme pour tout jeu dépassant l'heure de jeu sur l'indication de la boîte, vous vous surprendrez à la vitesse que vous parviendrez à jouer ces dernières ; vous en enchainerez probablement si comme moi vous accrochez au jeu.

La durée de vie est donc très bonne. Et à ceux qui se demandent si le jeu serait facile à "extensionner", je dis "oui". Déjà, rien qu'au niveau des cartes, il y aurait de quoi faire.

En ajoutant une capacité au temple et/ou en changeant la façon de gérer les cartes Sphinx également. Mais ça, c'est une autre histoire.

Le conseil de Jedisjeux

Certaines cartes "objectif secret" sont plus faciles que d'autres à réaliser.

L'obélisque par exemple, se termine bien souvent, ce qui est loin d'être le cas des tombes.

Notre conseil n'est pas de vous jeter forcément sur ces cartes, mais de ne construire en ces lieux que si vous en possédez, afin de ne pas aider les autres joueurs qui potentiellement possèdent de telles cartes.

Une des cartes Sphinx fait augmenter votre score final de 10% en fin de partie. elle donne très souvent plus de points que les autres, et ce, sans contrainte (sans parler qu'au final, elle est "win to win" : si j'ai beaucoup de points, j'en remporte beaucoup).

Si elle ne dénature pas le jeu (on peut jouer aussi de sorte de piocher beaucoup pour avoir plus de chances de tomber sur les bonnes cartes par exemple), nous conseillons de jouer sans elle, surtout si vous ne jouez pas à 4 joueurs, où les scores sont en général moins élevés.

Avis de la rédaction

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Un grand jeu que ce Egizia. Dans la lignée de l'âge de pierre, il propose pour une durée assez similaire de gérer au mieux ses priorités, en s'octroyant des cartes, en pensant à nourrir ses ouvriers et à les faire évoluer. Bien entendu, il faudra construire aussi et récupérer assez de pierres sera une autre de vos priorités. Le jeu est cependant plus exigeant que son homologue préhistorique, mais il procure tout autant de plaisir. Et comme la sensation ludique est différente, et les mécanismes assez lointains pour ne pas faire doublon non plus, on ne se privera pas d'avoir cette petite perle ludique à la maison, qui parvient à se hisser aux côtés des ténors du jeu de pose d'ouvriers (Les Piliers de la Terre, Vasco De Gama, L'âge de Pierre et Olympus). Beau, bon, riche et pas inaccessible, Egizia réussit le carton plein. Bravo !
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Ce jeu aurait pu être parfait s'il avait été réglé correctement. La descente du Nil est une idée géniale et parfaitement exploitée. L'interaction est bien réglée. La gestion des ouvriers est impeccable. Mais qu'est-ce qui ne va pas là dedans ? Tout simplement les cartes sphinx. On a beau se démener comme un fou, si les cartes sphinx ne viennent pas correctement, la partie est morte. On ne maîtrise absolument pas cette partie du jeu. On peut aller au Sphynx, dépenser 3 pierres pour en tirer 3 et gagner entre 3 et 10 points de victoire. La partie ne va se jouer que là-dessus. Si on a tiré la bonne carte Sphynx. Il existe des variantes pour appauvrir ou enlever les cartes sphinx, mais aucune ne résout le déséquilibre dû au hasard de cette pioche. C'est vraiment dommage, car sans ce défaut, ce jeu aurait été un chef-d’œuvre. Il n'en reste qu'un jeu moyen qui prend la poussière.
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