Critique de Fiasco

Une fois n'est pas coutume, on a testé un jeu de rôle. Enfin un jeu de rôle, un ovni plutôt, un jeu d'improvisation qui s'approche dans le fond d'un jeu de rôle mais qui s'en détache beaucoup dans la forme. Si vous voulez en savoir plus, il va falloir lire la suite car expliquer de quoi il en retourne dans l'introduction nous parait un peu compliqué.

Matériel

Fiasco se présente sous la forme d'un livre au format A5 avec une couverture souple. En 132 pages noir et blanc, on nous décrit le principe et les mécanismes du jeu, quelques environnements pré-construits, et pour mieux comprendre comment tout ça doit fonctionner, le livre finit sur une reconstitution de partie. Enfin, un petit goodies accompagne le livre, des cartes postales à thème , pour se mettre dans l'ambiance et donner une idée du thème. Les illustrations sont plutôt réussies, le style est très inspiré des réalisations du duo Kuntzel+Deygas. C'est très graphique, et ça a du punch, j'adore.

Règles

Le principe de Fiasco prend le jeu de rôle à contre-pied. Si vous avez l'habitude de la chose, vous risquez d'être dérouté, car dans Fiasco, personne n'interprète de héros, les joueurs jouent plutôt des anti-héros, et le vrai héros de la partie, c'est l'histoire que vous allez construire autour de vos personnages, le film que vous allez co-réaliser. Les personnages ne seront que les outils scénaristiques de votre inspiration et peu importe s'ils finissent mal au final, pour une fois, l'important c'est la chute, pas l'atterrissage.

On commencera par choisir un "playset", c'est une série de tableaux qui permettent de définir une situation de départ. Par rapport à un jeu de rôle classique, on peut considérer que chaque playset correspond à un univers de jeu, un cadre bien spécifique pour situer les personnages, les lieux, et l'histoire.

Il y a 4 cadres de jeu dans le livre de Fiasco mais on peut en trouver d'autres sur le net, ou même en créer, ce n'est pas très compliqué. Le cadre de jeu va définir les relations qui peuvent exister entre les personnages, les objets qu'on pourra trouver sur place, et les différentes motivations qui guideront les personnages.

Une fois le cadre choisi, le jeu peut commencer, chaque partie de Fiasco est organisée de la même manière.

- La préparation : pendant laquelle on définit la situation de départ, les relations entre les PJ (personnages joueurs), les motivations de chacun, et quelques accessoires permettant que ça dégénère un peu. En fait, on ne créer pas vraiment les personnages, on définit qui ils sont les uns par rapport aux autres, et ce qu'ils veulent, la partie étant courte, il n'est pas très utile d'avoir une idée précise de qui sont les personnages, ni besoin de caractéristiques techniques. Ce qui importe, c'est ce qu'ils vont pouvoir faire (ou rater), pas besoin non plus de construire un long background, puisqu'il y a de grandes chances que le personnage finisse raide d'ici 2 ou 3h de jeu (ou très très mal barré).

- Le premier acte : pendant lequel chaque PJ est le personnage principal d'une ou deux scènes.

Le principe des scènes, qui mettent les PJ en valeur, est un peu spécial (c'est là que le jeu diffère vraiment d'un jeu de rôle classique, et qu'il se rapproche plus d'un film). A chaque manche, un joueur différent dirige une scène, qui n'est pas forcément la suite directe de la précédente. Comme dans un film, il peut y avoir des élipses et des flash-back. Quand vient votre tour, vous choisissez si vous établissez le cadre et les circonstances de la scène ou si vous en déciderez la chute, vous ne pouvez faire les deux, si vous choisissez le début, les autres joueurs vous imposeront la fin et inversement.

En gros, quelqu'un va décrire une scène avec un lieu et quelques personnages et dire ce que le PJ principal cherche à obtenir dans la scène. On va jouer la scène, faire interagir les personnages, jusqu'au moment ou le PJ central sera sur le point d'obtenir ce qu'il veut. A ce moment là, celui qui résout décide si le PJ parvient à son objectif ou pas. Les joueurs en scène doivent alors respecter sa décision et décrire la réussite (ou l'échec) de l'action. En gros, y'a des moments où certaines réactions seront imposées à votre personnage, contrairement à un JdR classique, mais c'est pour le bien de l'histoire, et le plus souvent pour le malheur de nos héros.

- L'embrouille : A la fin du premier acte, on ajoute un petit truc qui va empêcher les personnages d'atteindre trop rapidement leurs objectifs, on ajoute un grain de sel, appelé l'embrouille, ce sera un élément de plus que les joueurs pourront sélectionner dans les scènes.

- Le deuxième acte : qui suit le modèle du premier. Chacun a, à nouveau, l'occasion de mettre en valeur son personnage dans une ou deux scènes, la différence principale étant qu'il faut intégrer l'embrouille à un moment donné (ou plusieurs) dans une scène.

- Le dénouement : Une fois que toutes les scènes ont eu lieu, chaque joueur va pouvoir chercher une conclusion à l'histoire de son personnage. Ca se fait via des phrases courtes. Selon les événements qui ont eu lieu pendant la partie, cette fin pourra être heureuse ou tragique pour chaque héros.

Les règles de Fiasco sont vraiment simples, le système de jeu est réduit au minimum pour permettre de se concentrer sur l'important, la création de l'histoire et surtout l'improvisation.

Durée de vie

La durée de vie du jeu dépend énormément des "playset" qui vous intéressent. En effet, le livre de base de Fiasco présente 4 "univers" de jeu pour une partie de Fiasco, mais Edge, qui a traduit Fiasco dans notre langue, en a mis d'autres à disposition gratuite sur son site web, et on peut encore en trouver d'autres sur le site de l'éditeur original du jeu : Bully Pulpit Games, mais ceux-là sont en anglais du coup. Il est également sorti une suite, appelée Fiasco assuré, qui ajoute 4 cadres supplémentaires ainsi que des tables d'embrouilles et de dénouements pour chambouler encore un peu plus la vie de vos héros.

En jouant avec les mêmes personnes, il faudra changer de playset assez souvent si on ne veut pas rejouer 2 fois la même partie. Mais en dehors de ça, c'est un jeu de rôle, y'a une infinité de choses qui peuvent arriver à partir d'une seule situation de départ. Tout dépend de l'envie des joueurs au moment de la partie.

Le conseil de Jedisjeux

Pour fluidifier la première partie, assurez-vous qu'un des joueurs ait lu la totalité du livre, de sorte qu'il maîtrise les règles et que l'action ne soit jamais ralentie par un détail technique.

C'est un jeu d'improvisation, mais le choix du cadre est important, en fait, il est même crucial si on souhaite faire décoller l'intrigue. Choisissez un playset qui donne des idées à tous les joueurs autour de la table, dès la préparation.

Pendant la préparation, sélectionnez vos éléments avec précaution, n'hésitez pas à en discuter avec les autres, pensez à vos personnages, à qui ils sont et à ce qu'ils désirent. Le jeu conseille d'utiliser des post-it, et c'est vraiment indispensable au début. Précisez les relations, les objets et les motivations, mais pensez aussi à faire un petit pense-bête pour chaque personnage. Notez son nom, son boulot, et tous les détails qui vous semblent nécessaires pour lui donner vie, et vous souvenir de qui est qui. Contrairement à la plupart des jeux de rôles les PJ ne seront définis que par leurs relations, il ne faut donc pas les choisir au pif, mais bien avec la conviction qui mettra du sel dans l'histoire que vous allez construire.

Enfin, peut-être le conseil le plus important, intégrez "la motivation" dès les premières scènes que vous jouez, c'est elle qui fera décoller votre histoire généralement.

Avis de la rédaction

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Dans le jeu de rôles, j'ai toujours préféré le roleplay au reste. C'est bête à dire, mais moins y'a de règles dans un jeu mieux je me porte. Je me suis donc jeté sur Fiasco dès sa sortie. La lecture du bouquin m'a intrigué, et j'étais vraiment pressé de faire ma première partie. Celle-ci ne fut pas un grand succès pour être honnête, tout le monde y allait à tâtons, sans grande conviction sur l'utilité des scènes qu'on allait jouer. Notre principale erreur est sans doute de n'avoir pas tenu compte de la motivation pendant le premier acte, nous aurions du l'intégrer dès les premières scènes. Conséquence : notre histoire a eu du mal à décoller, et je pense que notre premier film n'aurait pas rencontré son public s'il était sorti en salles. Malgré cela, la fin de partie fut plutôt agréable et le dénouement était même excellent. Ayant compris nos erreurs, j'avais hâte de retenter l'expérience avec un autre cadre, la conquête de l'ouest. Après plus de 2 ans, je n'ai pas eu l'occasion de ressortir Fiasco de ma bibliothèque, mais je ne désespère pas de le faire un jour. J'aimerai vraiment jouer avec quelqu'un qui a déjà plusieurs parties à son actif pour donner une seconde chance à ce jeu vraiment atypique.
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