Loïc Lamy

A l'occasion du 1ier Festival du jeu de Montpellier qui s'est déroulé le 14 juin à la Salle des Rencontres de l'Hôtel de ville, Loïc Lamy est venu nous présenter son prototype "Marchands du Nord", un jeu qui nous invite à faire du commerce en mer Baltique à l'époque de la ligue Hanséatique...tout un programme et un redoutable défi pour les joueurs, tant la concurrence peut y être rude !

Nous en avons profité pour poser quelques questions à l'auteur.

Bonjour Loïc !

Tu es venu au festival de Montpellier, comme d’autres auteurs, pour nous présenter l’un de tes proto, Marchands du Nord.

Pourrais-tu te présenter un peu afin que l’on te connaisse un peu mieux ?

LL : Bonjour. Je m'appelle Loïc Lamy, sur Internet on me croise sous le pseudo lynkowsky. J'ai 31 ans, 1 enfant (et très très bientôt le second !), j'habite au sud de la Haute-Garonne, près des Pyrénées, à Aurignac, et je suis professeur des écoles, je fais des remplacements avec des élèves souffrant de divers handicaps.

Quelques mots sur ton « parcours » ludique : depuis quand t’intéresses-tu aux jeux de plateaux, et quels sont les premiers jeux qui t’ont vraiment attiré vers ce loisir ?

LL : Quand j'étais enfant, mon père était abonné à Jeux & Stratégie. Mes premiers jeux de plateau furent donc les jeux en encart de la revue. Avec mon frère (mon aîné de 4 ans), nous jouions assez souvent, ainsi qu'aux classiques (échecs, dames, go...). En plus des affreux habituels (Bonne Paye, Monopoly), j'avais Labyrinthe, Le lièvre et la Tortue puis vinrent Risk et Diplomacy (qu'on sortait avec ses potes de lycée), plus quelques jeux de son invention. Puis mon frère s'est tourné vers le wargame et le jeu de rôle, j'ai pas trop accroché. Pour ma part, j'ai alors moins joué. En arrivant à la fac je me suis plus tourné vers les échecs - je joue d'alleurs toujours en club, avec un Elo de 2050.

Je suis cependant revenu peu à peu vers le jeu de plateau : on m'a offert quelques jeux (La guerre des moutons doit être le premier), j'ai fréquenté un salon de thé toulousain où pas mal de monde jouait (en particulier Jungle speed, Citadelles), et j'ai vraiment (re)découvert la richesse de cet univers en allant au festival du jeu à Toulouse en 2004. Depuis, j'ai vraiment attrapé le virus, et je ne décroche plus.

Globalement, quelles qualités un jeu doit-il avoir pour attirer ton attention et te donner l’envie d’y revenir souvent ?

LL : J'ai des goûts assez large, donc je ne crois pas pouvoir trouver de règle générale. Je trouverais plus aisément ce qui ne me plaît pas : les règles à rallonge (à l'américaine), l'excès de hasard, ou encore le manque de choix stratégiques.

Aller, on sait que l’exercice n’est jamais facile, mais si tu devais nous donner un top 10, quels seraient les jeux que tu citerais ?

LL : Ca, c'est sûr que c'est pas évident !

Race for the Galaxy, pour la richesse et la variété des parties

Les échecs, tellement riche et complexe

Shazamm (en particulier l'adaptation online sur Boiteajeux.net), un savant mélange de tension, de guessing et de stratégie

Méditerranée, une très belle alliance entre commerce et guerre, un matériel splendide, un jeu vraiment très immersif

Pickomino - Sushi Bar, ces 2 jeux sortent à quasi chacun de mes apéros (très souvent donc !). Même si ce ne sont pas de grands jeux, ils méritent de figurer dans ce top 10.

Smallworld, simplicité, interaction, variété et grande richesse.

Colons de Catane à 2 (le jeu de carte), encore un jeu qui se renouvelle sans cesse.

Pandémie, le jeu qui m'a fait arrêter de dire que je n'aimais pas les jeux de coopération, sans doute grâce au thème auquel je me prends, et à la tension que cela apporte.

Agricola, tellement de choix, de possibilités, et puis un thème tel que même si on perd, on est bien content de sa partie !

Puerto Rico, dur de ne pas citer le top selon Tric trac...

Quel fut le déclic qui t’a amené à la création ?

LL : Le déclic est arrivé assez tard, au printemps 2007 ! Avec ma copine, on est parti quelques jours en Camargue. Elle prend pas mal de photo, alors que moi je suis plutôt réfractaire à ce genre d'engin... Alors, forcément, je la chambre et lui lance le défi de réussir la photo suprême : dans une même photo, un flamant rose, un cheval blanc et un taureau ! Elle n'y arrivera pas, mais moi, ça me donnera l'idée de faire un petit jeu. Celui-ci était franchement mauvais, mais j'avais franchi le pas et ensuite les idées n'ont cessé de débouler.

Quelles furent tes toutes premières créations ludiques ?

LL : Ce petit jeu sur les photos en Camargue, suivi d'un autre sur une guerre territoriale de chats ont été mes premières idées. Elles restent inabouties pour l'instant. Mes premiers jeu qui ont suscité du plaisir chez des joueurs furent Génétix (un jeu que j'ai ensuite laissé de côté, ne parvenant pas à trouver les réglages pour le rendre vraiment bon) puis Vide ton sac, un jeu d'ambiance (les joueurs peuvent voler des diamants - en mousse - et acheter des complices puis un inspecteur essaie de retrouver les voleurs en interrogeant les joueurs)

Parlons de Marchands du Nord : Pourquoi ce thème et comment te sont venues les idées des mécanismes généraux ?

LL : Sur ce jeu, je suis plutôt parti d'une mécanique : faire en sorte que les plus faibles puissent exploiter, voire même récupérer, ce qu'ont créé les plus puissants (par contre, je ne sais guère d'où m'est venue cette idée !).

La première piste fut un thème moyenâgeux, avec des villages que chacun développe, mais plus on la développe vite, plus on risque de voir une émeute qui fait basculer le village dans le camp adverse.

Puis, en tombant sur un jeu vidéo (Patrician), j'ai réalisé que le thème de la Ligue Hanséatique collerait vraiment bien à mon idée : des marchands développent des villes, mais celles-ci ne leur appartenant pas, s'ils développent trop, un autre risque fort de venir en profiter. Une fois ce thème choisi, j'ai de suite pensé au système d'achat avec utilisation immédiate : je voulais pas de stockage de dizaine de sortes de petits cubes ! De même la phase d'action où chacun son tour ne fait qu'une action m'est venu immédiatement, pour deux raisons : j'aime pas attendre mon tour pendant 20 minutes, et je voulais qu'il y ait une concurrence de tous les instants.

Comment as-tu procédé pour les réglages ? Tu fais jouer un groupe d’amis ou bien travailles-tu plutôt en solo ?

LL : Je gère l'essentiel des réglages en solo. J'ai la chance de pouvoir réussir à jouer 4 joueurs différents en jouant chacun avec une personnalité différente et en étant dégoûté lorsque je subis d'une autre personnalité un méchant coup imprévu (serais-je schizophrène ?). Pour le test à 2 joueur, je recrute ensuite ma copine. Pour plus de joueurs, je sors mon jeu quand il est à peu près au point auprès des membres de deux associations toulousaines (Jocere et Akrojeux). C'est souvent après ces tests que je valide vraiment les changements ou au contraire décide une grosse refonte - pour ce jeu il y a eu pas mal de gros changements.

Quelles sont les commentaires des joueurs qui reviennent le plus souvent sur Marchands du Nord ?

LL : Les commentaires sont dans l'ensemble très positif. Ce qui revient le plus souvent est l'envie de jouer une seconde partie, pour profiter de l'expérience de la première pour mieux jouer. Il faut préciser que le jeu ne dure que 4 tours, et généralement il faut un ou deux tours pour commencer à bien appréhender la mécanique. Il y donc assez souvent, pour la première partie, un sentiment de frustration, avec des phrases du type "j'aurais su/compris plus tôt, j'aurais pas fait ça".

Peux-tu nous parler un peu d'éventuels projets de jeux sur lesquels tu réfléchis en ce moment ?

LL : J'arrête pas d'avoir des projets ! Mais en ce moment il y en a deux projets qui m'absorbent plus :

- Des rails sur la prairie : un jeu de placement au Far West, chacun son tour place un cowboy sur une case, éventuellement occupée (les cowboys étant armé, forcément, il y a des duels), afin de récupérer des bâtiments qui rapportent des pouvoirs spéciaux et des dollars. De plus, une voie ferrée arrive dans la ville, provoquant des expropriations, et changeant la valeur des bâtiments (être près de la gare, c'est rentable). Ce jeu est déjà pas mal avancé, j'en suis à la phase des petits réglages, et en plus j'ai trouvé un illustrateur qui a souhaité collaborer à ce projet, donc on va essayer de sortir un joli prototype pour la fin de l'été.

- mon prochain prototype, tout est prêt dans ma tête (sauf le titre !), il me reste plus qu'à le fabriquer pour tester. En gros, des méchants barbares veulent envahir notre ville. Chaque joueur va former ses soldats pour tuer du barbare et ainsi gagner des points. L'originalité : il y a 7 conseillers, qu'il va falloir convaincre de voter pour nous (en leur tenant des promesses pas forcément tenues, en les corrompant...). A chaque tout le vote de ces conseillers va faire élire un joueur maire. C'est ce joueur qui décidera quelles actions chacun réalisera - il en tirera des avantages, mais aussi quelques inconvénients.

As-tu des contacts interessants avec quelques éditeurs ? A quand le prochain "Loïc Lamy" sur les étals ?

LL : J'ai des contacts, mais pour l'instant, rien de bien concluant. Mais bon, je crois qu'il faut savoir prendre son temps, et ne pas trop se prendre la tête avec ça...

La dernière question tarte à la crême : si tu ne devais conserver qu'un seul jeu, pour toi, ce serait... ?

LL : Un seul jeu ? Mais ce serait criminel !

Merci de ta participation Loïc et à bientôt.

LL : De rien, ce fût un plaisir !

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