Le savoir-faire du thé avec Alubari

« Alubari, a nice cup of tea » est une sorte de nouvelle version de Snowdonia ou, pour ma part, un nouveau scénario pour le jeu (sauf qu’il ne nécessite pas de posséder Snowdonia).

Vous allez participer à la construction du chemin de fer himalayen, en partant de Siliguri town pour arriver à Darjeeling, vers le sommet de l’Himalaya. De plus, vous pourrez avoir des plantations de thé, afin de récupérer des feuilles de thé pour fabriquer du Chaï. De cette manière, vous pourrez donner un délicieux breuvage à vos ouvriers qui travailleront nettement mieux (et vous renforcerez donc vos actions).

Si vous connaissez Snowdonia, vous retrouverez clairement les mécaniques de celui-ci avec quelques différences.

Le jeu nous est proposé en français par Studio H et il est sorti à la fin de l'année 2019.

A l’intérieur de cette boite

Contenu de la boîte

Contenu de la boîte

Alubari est une boite carrée, format similaire à beaucoup d’autres jeux comme les Aventuriers du Rail. On y retrouve un grand plateau de jeu, des cartes, des jetons en forme de feuilles de thé, une série de marqueurs en bois (cubes, disques et barres), des ouvriers stylisés, un sac en tissu, quelques jetons en carton pour bloquer des actions et pour indiquer la présence du brouillard, un carnet de score et la règle du jeu. De plus, il y a une petite locomotive en bois pour indiquer qui est le premier joueur.

L’ensemble de ce matériel est de très bonne qualité et est superbement illustré par Cécile Guinement. L’iconographie sur le matériel est très vite assimilée et on y retrouve toutes les informations nécessaires. Même si parfois, on prend un raccourci visuel alors que les choses sont clairement indiquées (et je n’ai pas encore compris pourquoi, mais c’est arrivé plusieurs fois). Plusieurs personnes ont en effet confondu le nombre de feuilles de thé nécessaire et les points de victoire de la ville de Silguri Town. Résultat, on croit qu’il faut 12 feuilles de thé alors qu’il n’en faut que 3 pour gagner les 12 points de victoire.

En tout cas, c’est un très beau jeu, qui donne déjà envie, rien qu’en le mettant en place.
Si vous souhaitez avoir un aperçu complet du matériel du jeu, je vous invite à faire un tour sur le « C’est dans la boite » du jeu.

Comment on joue ?

Une partie de Alubari va se jouer en une série de tours consécutifs et la partie s’arrêtera quand l’intégralité des rails seront construits, c’est-à-dire que la route ferroviaire atteindra Darjeeling. 
Chaque tour proposera certains contrats et certaines marchandises mais sera également influencé par la météo.

Les contrats permettront au joueur de scorer des points en fin de partie. Pour se faire, il devra avoir construit ou obtenu ce qui est indiqué sur la carte : avoir construit des rails, des gares, avoir un certain nombre de plantations, de feuilles de thé, ... Bien entendu, tout ce que vous utilisez pour une carte contrat, ne pourra pas être utilisé pour marquer des points ailleurs. Il s’agit clairement d’une partie importante pour le scoring et ça peut rapporter pas mal de points. De plus, chaque carte contrat à un pouvoir, qui permet d’améliorer une action ou de réaliser quelque chose une fois par partie. Cependant, que ce pouvoir soit utilisé ou non, vous pourrez scorer le contrat en fin de partie.

Modification suite à la météo

Modification suite à la météo

Au niveau de la météo, trois cas sont possibles : il y a un magnifique soleil, il pleut ou il y a du brouillard. Cette météo va influencer certaines échelles et donc la puissance de certaines actions : le nombre de débris qu’on peut déblayer par action, le nombre de rails qu’on peut poser par action et le nombre de feuilles de thé qu’on peut récolter. De plus, en cas de brouillard, deux actions sont bloquées : la dernière de l’action déblayage et la dernière de la pose de voie. Eh oui, la visibilité n’est pas assez bonne pour profiter pleinement de ces actions. Autre petit twist au niveau de la météo, c’est qu’elle peut déclencher une récolte de thé. Dans ce cas, chaque joueur récupère une feuille de thé par plantations qu’il possède.

Pour les matériaux, l’entrepôt stockera les ressources disponibles pour chaque manche. On pourra y trouver du fer, de la pierre et du chaï. Attention, ce dernier est assez rare, il n’y en a pas beaucoup et quand il est utilisé, il ne revient pas dans le sac des ressources. Eh oui, si vous buvez le thé, la tasse est vide, il n’y en a plus :p Quand vous prenez un cube de chaï, vous avancez votre marqueur sur l’échelle de chaï qui indiquera combien vous en possédez et vous défaussez définitivement le cube. Et cette échelle montre une fois de plus la rareté du chaï vu qu’elle est très limitée (maximum 5 en fonction du nombre de joueurs).

Au final, chaque tour est constitué de 5 phases :

  1. Réapprovisionnement des cartes contrats : si une carte est présente sur le premier emplacement, elle sera défaussée, puis toutes les cartes seront réalignées et on complètera le marché avec de nouvelles cartes contrats (Il y en a toujours 3 de disponibles par manche).
  2. Ajustement de la météo : on retire le jeton météo de la précédente manche, on fait descendre les deux jetons suivants et on place le troisième jeton météo (indiqué par le dos de la prochaine carte contrat). On connait donc toujours la météo de la manche et des deux futures manches.
  3. Réapprovisionnement de l’entrepôt et résolution des évènements : on pioche un certain nombre de cubes dans un sac. On pourra y trouver des cubes de fer (orange), de pierre (gris), de chaï (vert) ou des cubes évènements (blanc). Si des cubes évènements sont piochés, ceux-ci sont résolus immédiatement.
  4. Assignation des ouvriers aux actions : chaque joueur a deux ou trois ouvriers (s’il a appelé un renfort). Ceux-ci sont placés sur les différentes actions, un par un.
  5. Résolution des actions : Chaque action est résolue dans l’ordre en commençant par le joueur qui s’est posé sur la première case et ainsi de suite.
Les actions

Les actions

Passons maintenant en revue les différentes actions que vous pourrez faire sachant que vous pouvez booster votre action :

  1. Entrepôt : cette action vous permettra de récolter 3 resources disponibles dans l’entrepôt dont un chaï (s’il y en a). De plus, celui qui se place sur le dernier emplacement et donc, qui aura le moins de choix, deviendra le premier joueur. Si vous boostez cette action en dépensant un chaï, vous pourrez récupérer 2 ressources de plus dont, à nouveau un chaï.
  2. Déblayage : les plantations sont recouvertes de débris en début de partie. Cette action vous permettra de retirer un certain nombre de débris dépendant de l’échelle de débris influencée par la météo. Si vous retirez les derniers débris d’une plantation, vous en devenez l’heureux propriétaire. Si vous boostez cette action en dépensant un chaï, vous pourrez récupérer 3 débris de plus. Les débris que vous retirez viendront dans vos réserves et pourront vous servir par la suite pour avoir de la pierre ou construire certaines gares.
  3. Fonderie : la fonderie vous permet de fabriquer des barres d’acier à l’aide de 3 blocs de fer, d’obtenir 1 pierre à l’aide de 2 gravats ou, inversement, de broyer 1 pierre pour obtenir 2 gravats. Vous pouvez faire jusqu’à 3 mini-actions, combinées comme vous le voulez. Si vous boostez votre action en dépensant un chaï, vous pourrez non seulement faire autant de mini-actions que vous voudrez mais surtout, il ne vous faudra plus que 2 cubes de fer pour faire une barre d’acier.
  4. Pose de voie : cette action vous permet de construire les voies du chemin de fer. Le nombre de voies que vous pourrez construire par action dépendra de l’échelle des voies qui sera influencée par la météo. De plus, chaque voie construite vous coûtera une barre d’acier. Si vous boostez cette action en dépensant un chaï, vous pourrez construire 2 voies de plus.
  5. Construction : ici vous pourez choisir entre construire une gare ou un équipement. Si vous boostez votre action avec un chaï, vous pouvez faire une deuxième action de construction au choix (gare ou équipement).
  6. Bureau de poste : c’est ici que vous pourrez récupérer des contrats. Chaque action vous permet de récupérer une carte contrat parmi celles disponibles. Et si vous boostez l’action en dépensant un chaï, vous pouvez, avant de choisir votre carte, remplacer toutes les cartes disponibles.
  7. Le Chaiwala : cette action vous permet soit de récupérer des feuilles de thé, en fonction de la valeur de l’échelle de thé, soit de convertir des feuilles de thé en chaï. Par contre, cette action ne pourra pas être boostée.

Au début de la phase action, avant de commencer à poser vos ouvriers, chaque joueur devra décider s’il engage un renfort pour ce tour, afin d’avoir 3 ouvriers au lieu de 2. Pour ce faire, vous devez posséder un équipement et payer le coût nécessaire : un chaï, sauf une carte qui permet de payer son ouvrier avec 2 débris (il n’aime pas le thé apparemment). Ensuite, chaque joueur place à son tour un ouvrier, jusqu’à ce que tous les ouvriers soient posés. Lors de la résolution, les actions sont résolues dans l’ordre (de A à G) et les joueurs peuvent activer le pouvoir d’une carte contrat correspondant à l’action en cour.

Les évènements, quant à eux, vont venir rythmer la partie. En effet, ils vont déblayer les plantations (et en prendre la propriété), construire des voies, construire l’intégralité des sections de gare d’une ville, vous obliger à faire la maintenance de vos équipements (soit vous payez 1 barre d’acier ou 2 chaï, soit vous perdez votre équipement), faire une croissance de la culture voire même déclencher une récolte. Ces événements vont faire avancer le jeu, sans trop savoir à quel vitesse car même si on connaît l’ordre des événements et qu’on sait le nombre de cubes blancs qui sont dans le sac (et qui sont remis régulièrement dedans), il restera toujours l’aléatoire de la pioche.

Au final, quand la toute dernière voie du chemin de fer est posée, la fin de partie est déclenchée et se terminera à la fin de la manche. A deux joueurs, une autre condition de fin de partie intervient si un des joueurs pose son dernier marqueur de propriété, son adversaire jouera alors une dernière manche et la partie s’achève.

Pour le décompte final, les joueurs marquent des points pour les plantations et les gares qu’ils possèdent, les voies qu’ils ont construites, les cartes contrats réalisées, les équipements qu’ils possèdent et pour finir un demi point par feuilles de thé qu’ils leur restent.

Au final, le jeu propose une mécanique qui fonctionne vraiment bien, avec des événements qui vont rythmer la partie et une règle très bien écrite et très claire.

Les différences avec Snowdonia

Snowdonia

Snowdonia

La première grande différence est que dans Alubari, en plus de construire le chemin de fer, on récolte du thé et on peut gérer des plantations. De plus, les feuilles de thé peuvent être transformées en chaï.

Eh oui, la deuxième différence est que le chaï remplace le charbon de Snowdonia et avec quelques différences. Le chaï est encore plus rare que le charbon, vu que contrairement à celui-ci, il ne retourne jamais dans le sac des ressources mais est définitivement écarté du jeu. D’un autre côté, on pourra à certains moments le fabriquer. Cependant, il est comptabilisé sur une échelle très limitée dépendant du nombre de joueurs. On ne peut donc pas faire de stock en grande quantité. De plus, le chaï peut, tout comme le charbon, être utilisé pour engager un troisième ouvrier et il peut aussi booster les actions réalisées, ce qui n’existe pas dans Snowdonia. Et pour finir, le chaï non utilisé marque des points en fin de partie, alors que pour le charbon il faut une carte contrat spécifique.

La troisième différence concerne le déblayage. Dans Snowdnia, on doit retirer les débris des emplacements pour les voies entre les gares et dans les gares. Si on déblaie une carte voie, celle-ci est disponible et on peut y construire une voie. Dans les gares, si on dégage une voie, on en devient directement propriétaire et on gagnera les points indiqués. Dans Alubari, ce sont les plantations de thé qui doivent être déblayées, et celui qui en libère une entièrement en devient le propriétaire.

La quatrième différence est l’absence du contremaître dans Alubari. Et il n’y a pas réellement quelque chose qui le remplace.

La dernière différence se retrouve parmi les actions possibles à la fonderie. On ne peut pas convertir les pierres en gravats dans Snowdonia. En même temps, dans Alubari, on peut construire des gares en gravats et en plus il y a une carte contrat qui permet de gagner des points si on en construit un certain nombre.

Voilà les différences, du moins celles que j’ai remarquées. En comparant bien entendu au jeu de base de Snowdonia. En effet, ce dernier possède un très grand nombre de scénarios, ce qui n’est pas le cas d’Alubari.

La partie en solo

Le jeu propose une variante solo avec les différences suivantes :

  • Vous commencez la partie avec le double de marqueurs de propriété
  • Trois sections de voies aléatoires déjà construites
  • Il n’y aura que 3 équipements de disponibles au lieu de 7
  • Quand vous réapprovisionnez les cartes contrats, vous défaussez toutes les cartes restantes
  • Lorsque le premier événement est déclenché pour la deuxième, il n’est plus possible de construire des gares à Siliguri Town
  • La partie s'achève quand le dernier rail est posé ou quand vous avez posé tous vos marqueurs propriétés 
  • Vous ne pouvez pas posséder plus de deux equipments à la fois et en plus ceux-ci ne rapporteront aucun point de victoire en fin de partie
  • De plus, la particularité très sympa de cette version solo, c’est qu’elle vous propose pleins de réalisations à tenter de remplir. Comme on peut souvent en trouver dans les versions numériques des jeux. Il y a des réalisations de construction, de score, de réserve personnelle et même de campagne.

Je ne suis pas forcément version solo, ou alors uniquement en version numérique, mais ces réalisations ont le mérite de donner l'envie de s’y frotter.

La durée de vie du jeu

Le jeu offre quelques changements entre les parties, grâce aux différentes cartes. Les cartes plantation sont recto-verso et on n’a donc pas toujours la même configuration. Il y a aussi une carte équipement en plus que nécessaire, donc une très légère variété. Mais, ce qui fait que les parties ne se ressemblent pas, c’est la pioche des contrats, la météo qui va influencer fortement nos actions et les événements qui arrivent aléatoirement.

Le jeu va donc demander de s’adapter à ce côté aléatoire et il offre en plus pas mal de possibilités stratégiques. Il semble également avoir une belle courbe de progression pour maîtriser de mieux en mieux le jeu.

Tout cela lui donne une très bonne rejouabilité et en tout cas pour le moment, je ne m’en lasse pas. Maintenant, en possédant également Snowdonia et tous ses scenarios, c’est un peu comme si j’avais un nouveau scénario à jouer sur une mécanique très semblable. Donc Alubari s’essoufflera peut-être a un moment donné mais pour ma part il continuera de tourner avec Snowdonia.

Avis de la rédaction

avatar

J’ai eu l’occasion de découvrir Snowdonia quelques mois avant la sortie d’Alubari et j’ai adoré ce jeu. Quand Alubari est sorti, je pensais faire l’impasse parce que j’avais déjà l’intégral de Snowdonia, pas besoin d’avoir un nouveau jeu semblable.

Au final, je ne le regette absolument pas! Il n’est pas du tout redondant avec Snowdonia. Même si on retrouve l’essence même de la mécanique, les quelques différences suffisent pour donner des sensations de jeu différentes et tout aussi intéressantes.

Le jeu est vivant grâce à la modification de la météo et aux événements qui vont donner un certains rythmes à la partie. Il faut donc toujours s’adapter au mieux pour profiter au maximum de chaque tour. Ce qui fait qu’on ne sais jamais à quoi on doit s’attendre pendant la partie et qu’on doit adapter sa stratégie aux conditions. Et ça rend chaque partie très intéressante.

En plus de cela, le jeu est magnifique et très agréable à manipuler. Une très belle découverte et un coup de cœur pour moi.

Réagir à cet article

Il y a 3 commentaires

Krissou
By Le Zeptien | 7 mai 2020 à 08:50

Merci beaucoup pour cet article. Je "tourne" autour d'Alubari depuis un moment. Il était sur une table du festival du jeu ici en mars (une semaine avant le confinement !), mais je n'ai pas eu l'occasion d'y jouer. Je connaissais déjà  Snowdonia (voir CR) :   https://www.jedisjeux.net/jeu-de-societe/snowdonia/parties/4392

.... d'ou ma curiosité pour cette version bien plus jolie en effet. Merci donc pour toutes ces précisions. :-)

Krissou
By cyril83 | 8 mai 2020 à 18:09

Merci Krissou pour le partage de ce coup de coeur, car ayant déjà loupé snowdonia, du coup je suis très curieux de tester ce Alubari :)

Krissou
By Krissou | 9 mai 2020 à 14:12

Avec plaisir, j'étais pas du tout attirée me disant que j'avais assez à faire avec Snowdonia, mais je suis vrai heureuse de l'avoir découvert et du coup de le faire découvrir :)